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Dossier: Harcèlement sexuel
15 juill. 2020 Chroniques d'auteurs

Dossier: Harcèlement sexuel

Par Catherine Girard-Audet

*Article tiré de l'ABC des filles.

Chères lectrices,

Dans la foulée du mouvement #Metoo, plusieurs personnes, dont certaines personnalités connues du public, ont avoué avoir été victimes de harcèlement ou d’agression à caractère sexuel. S’en est suivi toute une série de témoignages sur les réseaux sociaux de la part de femmes issues de tous les domaines et de toutes les nationalités qui ont décidé de dénoncer ces gestes à leur tour.

J’ai d’ailleurs moi-même raconté quelque chose que j’avais gardé pour moi depuis près de dix ans. Alors que j’étais dans un bar à Paris, un homme m’avait isolée dans un coin avant de me toucher le postérieur pendant plusieurs secondes. Je l’avais repoussé, et ses amis s’étaient bidonnés. Je me souviens d’avoir ressenti un mélange de rage, d’impuissance et de honte. Je me sentais sale qu’on m’ait touchée, et l’une de mes premières réflexions, ç’a été de me dire que ma jupe était peut-être trop serrée. Lorsque les témoignages ont commencé à se répandre, je me suis évidemment sentie interpellée, et j’ai compris que le problème résidait non seulement dans le fait qu’un homme m’ait touchée sans que je lui donne la permission de le faire, mais aussi que je me sois remise en question et que j’aie pensé pendant plusieurs années que j’étais un peu responsable. Au fond, je sais que je n’ai rien à me reprocher et que le fait de porter une robe moulante ne représente en aucun cas une invitation pour qu’un gars que je ne connais pas me touche les fesses, mais ça m’a fait réaliser qu’on avait encore beaucoup de chemin à faire pour que cette perception parfois très inconsciente disparaisse complètement. D’un côté, il faut apprendre aux gars (et aux filles) à respecter les autres et à ne pas commettre de gestes déplacés, ni à interpréter un non pour un oui, mais de l’autre, il faut aussi apprendre à mettre nos limites et à dire NON quand ça ne va pas.

J’ai aussi constaté au fil de mes lectures que la définition et l’interprétation  de certains gestes portaient parfois à confusion. Par exemple, un garçon qui s’approche trop près de vous peut percevoir cela comme une technique de drague, alors que vous l’interpréterez comme une présence envahissante qui vous donnera envie de le repousser. Dans le même ordre d’idées, si vous souriez à quelqu’un parce que vous le trouvez de votre goût, à vos yeux, ce n’est pas une invitation pour qu’il vous embrasse, alors que pour lui, le message était clair. C’est pourquoi j’ai décidé de me pencher sur la question dans ce petit dossier spécial en vous présentant une petite encyclopédie des gestes déplacés et des différentes orientations que peuvent prendre le harcèlement et les agressions sexuelles. 

Encyclopédie des gestes déplacés

Blague à caractère sexuel : Je sais que ça ne vous paraît peut-être pas si grave d’entendre des blagues grivoises ou à caractère sexuel, mais si vous ne la trouvez pas drôle et que ça vous met mal à l’aise, c’est généralement signe que ça ne l’est pas, et il ne faut pas vous gêner pour le dire. 

Regard inapproprié : Si quelqu’un vous fixe sans cesse, vous lance des regards remplis de sous-entendus ou vous regarde avec trop d’insistance, il ne faut pas hésiter à le lui dire pour qu’il comprenne que ça vous rend mal à l’aise et que vous voulez que ça cesse. 

Commentaire déplacé et langage grossier : Si un garçon ne cesse de vous répéter qu’il vous trouve sexy, que vous avez de belles fesses et que ça vous rend mal à l’aise, c’est important de le lui dire. Au même titre que quelqu’un qui utilise un langage grossier pour s’adresser à vous et qui vous manque de respect. Évidemment, il faut nuancer avec quelqu’un qui vous complimente sur vos yeux ou qui souligne qu’il vous trouve jolie ; je crois que tout est dans l’approche, dans les mots utilisés, dans l’insistance et surtout dans ce que ça vous fait ressentir. Quoi qu’il en soit, n’hésitez jamais à mettre vos limites si quelqu’un se montre trop insistant ou fait un commentaire qui vous apparaît comme étant grossier ou inopportun.

Geste déplacé : On fait ici référence à un geste grossier ou à caractère sexuel qui sera commis devant vous (par exemple de l’exhibitionnisme ou quelqu’un qui a un geste vulgaire à votre égard). Évidemment, il y a une nuance à faire avec quelqu’un qui cherche simplement à attirer votre attention. Par exemple, si vous êtes à l’école et qu’un garçon pose sa main sur votre bras ou votre épaule pour vous parler, pas besoin de vous insurger. Si la proximité ne vous a pas plu, je vous conseille simplement de lui dire que vous préférez qu’il vous interpelle par votre prénom plutôt que de vous toucher.

Propager une rumeur à caractère sexuel : Encore une fois, si vous avez vu Treize raisons, vous saurez à quoi je fais référence. Si, par exemple, vous refusez de sortir avec un garçon et que pour se venger du refus, il raconte à toute la classe que vous avez une ITSS ou alors que vous avez couché avec tel ou tel garçon, il est primordial de le dénoncer.

Langage sexiste qui rabaisse quelqu’un en raison de son sexe : On parle ici de commentaires du genre « les filles sont toutes faciles », « si elle s’habille sexy, c’est parce qu’elle veut du sexe » ou « les gars ne pensent qu’au cul ».

Présence insistante : Si une personne vous impose sans cesse sa présence, vous poursuit ou se fait insistante pour que vous sortiez avec elle, n’hésitez pas à lui dire fermement que vous n’êtes pas intéressée et que vous voulez qu’elle vous laisse tranquille, sans quoi vous devrez en parler à un professeur, à un surveillant ou à un parent.

Envoi d’images grossières ou inappropriées : À l’ère des textos, vous devez être extrêmement prudente avec le matériel que vous partagez avec les autres. N’acceptez jamais qu’on prenne des photos compromettantes de vous à moins d’être entièrement consentante et d’avoir pleinement confiance en la personne avec qui vous partagez votre intimité. Malheureusement, vous n’êtes jamais à l’abri des gens qui peuvent chercher à se venger ou à faire du mal en partageant des images personnelles de vous avec les autres.

Agression sexuelle/attouchement sexuel : On parle ici d’un geste à caractère sexuel commis sur vous sans votre consentement et contre votre volonté. Il est important  de mentionner que ces agressions peuvent aussi survenir lorsque vous êtes en couple, par exemple si votre copain vous touche alors que vous lui dites que vous ne voulez pas. D’où l’importance du consentement.

Menaces en échange de gestes à caractère sexuel : Certaines personnes peuvent utiliser leur pouvoir ou leur autorité pour vous menacer si vous ne répondez pas à leurs demandes. « Si tu ne sors pas avec moi, je vais envoyer cette photo de toi à tout le monde. » « Si tu ne m’embrasses pas, je te donnerai une mauvaise note. »

Inceste : Il s’agit de toute activité à caractère sexuel impliquant une personne majeure ayant un lien de parenté ou affectif avec une personne mineure, comme un parent, un beau-parent, un membre de la fratrie, un oncle ou une tante, un grand-père, un cousin, une cousine, etc.

Viol : Il s’agit ici d’une relation sexuelle qui vous est imposée et qui est non désirée de votre part, et qui implique une pénétration vaginale, orale ou anale.

Le consentement

C’est primordial de vous rappeler qu’il vous faut d’abord accorder votre consentement lorsque vous partagez un moment intime avec quelqu’un et que vous soyez certaine d’être à l’aise dans la situation lorsque vous donnez votre accord. Ce consentement sexuel doit être accordé de façon volontaire. En d’autres mots, si quelqu’un vous force à participer à des activités sexuelles, il s’agit d’une agression, au même titre qu’un individu qui vous poursuit, vous insulte ou se montre trop insistant exerce du harcèlement. Rappelez-vous que personne n’a le droit de vous imposer un contact intime contre votre volonté. Ce même accord doit toujours être donné librement. Bref, si vous ne dites rien parce que vous êtes intoxiquée ou parce que vous avez peur, ce n’est pas synonyme de consentement. De plus, vous ne devez jamais vous sentir responsable si quelqu’un abuse de vous ou fait des gestes contre votre gré. Ce n’est pas parce que vous avez consenti à boire de l’alcool ou à consommer de la drogue que vous êtes partante pour une activité sexuelle. Gardez en tête que l’unique responsable d’une agression est celui qui la commet. De même, ce n’est pas parce que vous embrassez un gars ou parce que vous le caressez que cela l’autorise à aller plus loin. Vous avez toujours le droit de dire non ou de changer d’avis si vous ne vous sentez plus à l’aise dans une situation.

Le harcèlement sexuel

Si vous avez été victime de harcèlement, c’est important d’en parler pour dénoncer votre bourreau, mais aussi pour ne pas vivre cette épreuve toute seule. Après tout, c’est normal de vous sentir secouée si vous sentez que quelqu’un a violé vos limites et vous a manqué de respect. Pour terminer, je crois sincèrement que dans la foulée du mouvement #MoiAussi, c’est en clamant haut et fort que les femmes ne tolèrent plus ce genre de comportements que les choses changeront. Toutes les formes de harcèlement sexuel sont inacceptables et doivent être dénoncées. C’est aussi simple que ça, alors n’ayez pas peur de joindre votre voix à la chorale.

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